Une législation ciblant notamment le « sharenting » a été approuvée par l’Assemblée nationale et le Sénat en mars et mai derniers. Découvrons les aspects d’un phénomène qui peut donner des frissons.
Un bel après-midi d’été au bord de la plage, vous observez avec tendresse vos enfants jouer avec leurs cousins. Vous sortez instinctivement votre smartphone pour immortaliser leur fierté devant leur château de sable réussi. Sans informer les jeunes protagonistes, la photo se retrouve rapidement sur votre story des réseaux sociaux, mettant potentiellement en danger vos chères têtes blondes… Selon une étude de l’Observatoire de la parentalité et de l’éducation numérique, partager des photos de mineurs n’est pas sans risques. Le terme anglais « sharenting », qui combine les mots « share » (partager) et « parenting » (parentalité), mérite une attention particulière.
Les inquiétudes autour du « sharenting »
Le « sharenting » a été mentionné pour la première fois en 2012 dans le Wall Street Journal. Ce phénomène désigne le partage par les parents de photos de leurs enfants sur les réseaux sociaux, tels que Facebook, Instagram ou TikTok. Dans la plupart des cas, les adultes ne demandent pas l’autorisation des plus jeunes avant de les exposer au public. Justine Atlan, directrice générale de l’association e-Enfance, estime que le « sharenting » est présent en France depuis environ dix ans.
En 2023, ce qui est nouveau, c’est le volume de contenus partagés par minute, sur toujours plus de canaux différents.
Il semble que la pandémie et les confinements successifs n’ont fait qu’amplifier ce phénomène.
Les influenceurs visés par la législation
Dans la continuité des lois visant à lutter contre les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux, l’Assemblée nationale a ciblé une pratique courante chez certains d’entre eux, notamment ceux spécialisés dans la petite enfance. Bruno Studer, député Renaissance du Bas-Rhin, est à l’origine de ce texte.
Nous sommes confrontés à un phénomène massif, qui aura des conséquences à l’avenir. Il est urgent de prendre conscience de cette réalité.
Depuis 1989, la Convention internationale des droits de l’enfant stipule que chaque mineur a le droit de préserver son identité, son nom et ses relations familiales. Il doit également être protégé contre les ingérences arbitraires ou illégales dans sa vie privée et les atteintes illégales à son honneur et à sa réputation. Ce texte introduit notamment la notion de vie privée dans la définition de l’autorité parentale. Les parents devront veiller au respect de la vie privée de leur enfant en ne faisant pas un mauvais usage de son image. Un accord des deux parents avant la diffusion de contenus relatifs à cette dernière est désormais nécessaire suite à la modification de l’article 373-2-6 du Code civil.
Protéger les enfants des prédateurs
En plus d’« associer l’enfant à l’exercice de son droit à l’image, selon son âge et son degré de maturité », la loi vise également à le protéger des prédateurs. En novembre 2022, le rapport du Comité des droits de l’enfant des Nations unies soulignait :
Europol et Interpol ont alerté sur la multiplication des échanges pédocriminels en ligne et la prévalence des contenus autoproduits par les jeunes eux-mêmes ou leur entourage.
Justine Atlan, directrice générale de l’association e-Enfance, rappelle une réalité glaçante.
Les pédocriminels sont excités par des choses très banales, qu’un esprit sain ne percevrait jamais comme tendancieux. Un enfant construisant des châteaux de sable, pour nous, c’est un bon souvenir. Pour eux, c’est une projection de fantasmes.
Source : France Info